Chapitre II - Des servitudes
Art. 867. - La servitude est un droit qui limite la jouissance d'un fonds au profit d'un autre fonds appartenant à un autre propriétaire. Elle peut être constituée sur un domaine de l'Etat dans la mesure où elle n'est pas incompatible avec l'usage auquel ce fonds est destiné.
Art. 868. - Le droit de servitude dérive de la situation matérielle des lieux ou s'acquiert par acte juridique ou par succession.
Toutefois, ne peuvent être acquises par prescription que les servitudes apparentes, y compris la servitude de passage.
Art. 869. - Les servitudes apparentes peuvent également être constituées en vertu de la destination du père de famille.
Il y a destination du père de famille lorsqu'il est prouvé, par tout moyen de preuve, que le propriétaire de deux fonds séparés, a établi entre eux une marque apparente créant ainsi un rapport de subordination de nature à indiquer l'existence d'une servitude si les deux fonds appartenaient à des propriétaires différents.
Dans ce cas, si les deux fonds passent entre les mains de propriétaires différents sans modification de leur état, la servitude est censée constituée activement et passivement au profit et à la charge des deux fonds, à moins d'une clause expresse contraire.
Art. 870. - A moins de convention contraire, la stipulation de certaines restrictions à la faculté du propriétaire du fonds d'y élever librement des constructions, telle que l'interdiction de bâtir au-dessus d'une certaine hauteur ou au-delà d'une superficie déterminée, crée des servitudes qui grèvent des fonds au profit des fonds voisins dans l'intérêt desquels ces restrictions ont été imposées. Toute violation de ces restrictions peut donner lieu à des réparations en nature. Toutefois, la condamnation peut se réduire à la réparation du préjudice, si le tribunal estime ce mode de réparation préférable.
Art. 871. - Les servitudes sont soumises aux règles établies dans leur titre de constitution aux usages des lieux et aux dispositions suivantes.
Art. 872. - Le propriétaire du fonds dominant a le droit d'entreprendre les travaux nécessaires pour user de son droit de servitude et pour le conserver ; il doit exercer ce droit de la manière la moins dommageable pour le fonds servant.
Les besoins nouveaux du fonds dominant ne peuvent entraîner aucune aggravation de la servitude.
Art. 873. - Le propriétaire du fonds servant n'est pas tenu de faire des ouvrages au profit du fonds dominant, à moins qu'il ne s'agisse d'ouvrages accessoires qu'exige l'exercice normal de la servitude, sauf stipulation contraire.
Art. 874. - Les frais des ouvrages nécessaires à l'exercice et à la conservation de la servitude, sont à la charge du propriétaire du fonds dominant, sauf stipulation contraire.
Si le propriétaire du fonds servant est chargé de faire ces ouvrages à ses frais, il a toujours la faculté de se libérer de cette charge en abandonnant le fonds servant, en totalité ou en partie, au propriétaire du fonds dominant.
Si les ouvrages profitent également au propriétaire du fonds servant, les frais d'entretien incombent aux deux parties en proportion du profit tiré par chacune d'elles.
Art. 875. - Le propriétaire du fonds servant ne peut rien faire qui puisse diminuer l'usage de la servitude ou la rendre plus incommode. Il ne peut, notamment, ni changer la condition actuelle des lieux, ni remplacer l'endroit désigné originairement pour l'usage de la servitude par un autre. Toutefois, si l'endroit originairement désigné devient tel qu'il en résulte une aggravation de la charge de la servitude ou tel que la servitude constitue un obstacle à la réalisation d'améliorations dans le fonds servant, le propriétaire de ce fonds peut demander que la servitude soit transportée sur une autre partie du fonds ou sur autre fonds lui appartenant ou appartenant à un tiers avec le consentement de ce dernier, pourvu que l'usage de la servitude dans le nouvel endroit soit aussi commode au propriétaire du fonds dominant qu'il l'était dans l'endroit précédent.
Art. 876. - Si le fonds dominant est divisé, la servitude subsiste au profit de chaque parcelle, pourvu que les charges du fonds servant n'en soient pas aggravées.
Toutefois, si la servitude ne profite en fait qu'à l'une des parcelles, le propriétaire du fonds servant peut demander qu'elle soit éteinte relativement aux autres parcelles.
Art. 877. - Si le fonds servant est divisé, la servitude continue à en grever chaque parcelle.
Toutefois, si la servitude ne s'exerce pas et en peut s'exercer en fait sur certaines parcelles, le propriétaire de chacune d'elles peut demander qu'elle soit éteinte quant à la parcelle qui lui appartient.
Art. 878. - Les droits de servitudes s'éteignent par l'expiration du terme fixé, par la perte totale du fonds servant ou la réunion du fonds servant et du fonds dominant entre les mains d'un même propriétaire; toutefois, la servitude renaît si la réunion des deux fonds vient à cesser.
Art. 879. - Les servitudes s'éteignent par le non-usage pendant dix (10) ans ; si la servitude est établie au profit d'un bien successoral d'une communauté de famille, elle s'éteint par le non-usage pendant trentetrois
(33) ans. Le mode d'exercice du droit de servitude peut être modifié par la prescription comme la servitude même.
L'exercice de la servitude par l'un des copropriétaires par indivis du fonds dominant interrompt la prescription au profit des autres copropriétaires; de même, la suspension de la prescription au profit de l'un de ces copropriétaires la suspend au profit des autres.
Art. 880. - La servitude prend fin si l'état des choses se modifie de sorte qu'on ne peut plus user de ce droit.
Elle renaît si les choses sont rétablies de manière qu'on puisse en user, à moins qu'elle ne soit éteinte par le non-usage.
Art. 881. - Le propriétaire du fonds servant peut se libérer totalement ou partiellement de la servitude si celle-ci a perdu toute utilité pour le fonds dominant ou si elle ne conserve qu'une utilité réduite hors de proportion avec les charges imposées au fonds servant.
« Retour